Dans une bourgade insignifiante d’un Empire inconnu, à la frontière d’un pays mystérieux et à une époque indéterminée, par une nuit d’hiver froide et enneigée, le curé est découvert assassiné, la tête fracassée par une pierre. Dans cette ville où Chrétiens et Musulmans vivent en bonne entente, qui pouvait lui en vouloir à ce point ? Heureux de pouvoir traiter une pareille affaire, le Policier, flanqué de l’Adjoint, mène l’enquête. Mais certains puissants n’ont-ils pas intérêt à brouiller les pistes ? Et le Policier, avec ses pulsions malsaines et incontrôlées, cherche-t-il réellement la vérité ?
Le style incomparablement riche de Philippe Claudel (L’Archipel du chien, Les Notes juin 2018) nous entraîne dans un monde sordide et sauvage, imaginaire mais tellement réel avec ses turpitudes, ses mesquineries et ses méchancetés propres à l’être humain. Il traite, parfois jusqu’au cliché, tous les thèmes essentiels et existentiels : l’Innocence et la pureté bafouées, la mort et la recherche de Dieu, la vanité et la lutte pour le Pouvoir, la veulerie des ivrognes et des paresseux, le mensonge systématique pour accuser l’étranger ou le plus faible etc… On peut regretter les descriptions répétées et complaisantes des sexes masculins turgescents tandis que les deux seules femmes présentes, caricaturales, incarnent la pureté ou la soumission résignée. Un roman malgré tout étonnant, très bien écrit, baroque, qui maintient le suspense jusqu’au bout. (V.A. et A.-M.G.)