Un asile psychiatrique perdu près d’un lac, d’une forêt, d’un village. Le personnel est bienveillant, la camaraderie rassurante, la routine immuable. Joseph, ou Tobias, y est reclus depuis des années. Il aime l’ordre, la règle. Son travail : écosser des pois, fabriquer des sacs en papier. Se protéger de la vie. Pas si bête, Joseph. Le docteur lui permet de se promener où il veut, d’aller à l’auberge. Il parle aux oiseaux, au chien. Avant, il était un grand écrivain ; un journaliste vient le voir, mais il ne veut plus écrire. Pas si bête. C’est l’été, il se baigne dans le lac, il montrera peut-être son secret aux oiseaux. Viennent l’hiver, la neige… Arnaud Rykner, né en 1966, a écrit quelques romans (La belle image, NB septembre 2013), essais et critiques. Servi par une langue épurée, hachée, répétitive, ce petit récit atteint son but après quelques pages : faire entrer dans la tête d’un « idiot », qui parle en phrases très courtes, factuelles, saute d’une idée, d’une image à l’autre. Le lecteur devient Joseph, pense et ressent comme lui ; avec plus d’intensité s’il connaît l’oeuvre et la vie tragique de Robert Walser, le grand écrivain suisse allemand, dont s’inspire cette histoire simple et bouleversante. (V.A. et M.W.)
Dans la neige
RYKNER Arnaud