Voilà plus de vingt ans que le commandant Salvatore Piracci surveille les côtes de la Sicile pour empêcher les immigrants clandestins de pénétrer en Italie. Il se souvient de ceux qu’il a sauvés d’une mort certaine mais aussi de ceux dont il a brisé les rêves d’une vie meilleure. L’ambiguïté de son rôle et la vacuité de sa vie lui deviennent insupportables. Parallèlement, Soleiman, jeune Soudanais, cherche à pénétrer en Europe au péril de sa vie.
Ce roman en forme de fable est animé de tout le souffle et de la finesse de Laurent Gaudé (Le soleil des Scorta, prix Goncourt 2004, NB août-septembre 2004). L’auteur compare implicitement l’Occidental solitaire, qui a perdu le goût de vivre faute de but à atteindre, à l’Africain galvanisé par la misère, qui reste solidaire de ses compagnons d’infortune. Malgré l’absence de tout manichéisme, certains lecteurs pourront trouver gênante une démarche trop didactique. En filigrane est évoqué l’avenir de ces sociétés européennes dont la volonté d’autarcie semble bien insuffisante à contenir le flot des candidats à un Eldorado.