Pour commencer, une séquence énigmatique : un mannequin, un cardinal et une longue limousine noire qui roule dans la nuit… Rien, dans le corps du livre, n’éclaircira le mystère. Le narrateur, qui ressemble à l’auteur comme un frère, est beaucoup trop assailli par des fantômes et son projet littéraire constamment court-circuité par des réminiscences, des digressions, des associations d’idées, des jeux de mots… « J’aime être à la fois dans deux lieux, deux époques éloignées et je ne sais laquelle est la plus présente… » déclare-t-il, navré de se sentir incapable de « ficeler » une histoire.
Jean-Jacques Schuhl est un écrivain parcimonieux. Entre ses deux premiers livres et le troisième, Ingrid Caven, qui lui a valu le prix Goncourt en 2000 (NB novembre 2000), trente ans se sont écoulés. Puis celui-ci dix ans après ! Son écriture en constante rupture de ton n’est pas sans charme, même si l’on peine à déchiffrer le vaste palimpseste de sa mémoire.