Errance en mer Rouge

ALESSANDRA Joël

Tom, professeur d’arts plastiques, a perdu sa femme. Très déprimé, il accepte un poste à Djibouti, dans la corne de l’Afrique où sont venus Kessel, Rimbaud, Monfreid. Il se lie d’amitié avec Fred, 25 ans de débrouille sur son boutre à livrer haschich et alcool, fasciné par cette Afrique abyssine en plein chaos des années 1990. Pêches illégales, décharges sauvages de bateaux occidentaux voyous, attaqués par des gangs de Somalie surarmés. Fred meurt en escortant un bateau et Tom va, à son tour, embarquer de petites cargaisons de marchandises. Innocentes ?

 

Inspirée de faits réels, cette épaisse bande dessinée cartonnée entre en résonnance avec la personnalité ambiguë d’Henri de Monfreid, grand écrivain, drogué, amer, cherchant un sens à la vie. De longues citations de La croisière du haschich entrecoupent les images, un décor infernal saisi dans toutes ses dimensions par la variété d’une puissante illustration. Le mal de vivre sourd de ces cases s’étirant en longues bandes, et de saisissants portraits fixent droit dans les yeux, tandis que des planches de photos d’époque, alliées à des croquis rapides, ramènent au temps des aventuriers. Le dessin est beau, et les tons sombres de ces figures de boucaniers s’intègrent dans une tonalité brun-sépia, rompue par les bleus changeants de la mer.