À Mégapolis, tous naissent aveugles. Limités à leur espace proche, guidés par des signaux sonores dans l’espace moyen, leur vie est réglée jusque dans les détails plus intimes : les rencontres amoureuses sont programmées et minutées, interrompant un instant leur travail. Quand Gabr recouvre la vue, il est face à un univers de dalles de béton et de traverses métalliques où se traînent des silhouettes en haillons. Est-il fou ? C’est ce que décrètent les psychosophistes auxquels il fait part de ses hallucinations. Névrose de l’espace lointain, répondent-ils. Cet univers effrayant est décrit dans le détail, tout dit la soumission, l’esclavage abrutissant. Tête baissée, les humains guettent les repères acoustiques, leurs noms semblent à moitié effacés comme celui de Gabr. L’espace lointain que ce dernier perçoit c’est la liberté, l’aventure. Le châtiment de cet écart rappelle les cliniques de l’époque soviétique : mise au pas et normalisation. Jusqu’à la révélation finale d’une élite dorée mais aussi peu libre et la tentation des délices de Capoue. L’auteur, Lituanien, donne une fable sombre, oppressante où la seule arme du héros est l’espoir d’un ailleurs. (R.F. et M.D.)
Espace lointain
MELNIK Jaroslav