Fantaisie villageoise

TRILLARD Marc

Jeanne Ambarel, jeune médecin fraîchement diplômée, s’installe à Malabre, un désert médical du sud-ouest. Accueillie sans enthousiasme par le maire, elle s’entête, avec la ferveur d’une néophyte, à démarrer là une vie professionnelle dont elle a fait siennes les exigences déontologiques. Elle pourrait vite renoncer devant l’indifférence ou la méfiance de sa patientèle supposée, pour le moins troublantes. Au contraire elle décide de comprendre : les décès survenus sans trace de suivi médical par son prédécesseur, les inhumations sans certificat, etc.

Un polar en milieu rural, non. Une « fantaisie » ! Écrit à la première personne, ce roman suit l’itinéraire de l’héroïne, le cheminement de son enquête au gré de ses conversations avec les autochtones : elle oppose son rationalisme à « la raison bancale » du village, une communauté rurale repliée sur elle-même dans un hors-la-loi favorisé par l’incurie administrative. Plus intéressant est le rapport de force qu’installe le romancier entre deux manières de faire face aux coups du sort.  « L’entêtant nectar de la coutume » érige l’isolement en sauvegarde, au rythme de rituels dont on a perdu l’origine et la signification. Vertige de la raison ? L’écriture dense et efficace alterne les dialogues et un monologue intérieur souvent décalé, contaminé par le parler local. L’efficacité professionnelle passerait-elle par l’empathie, la compréhension des autres, leur « fantaisie » plus que par un affrontement stérile ?    (C.B et J.G)