Fuir.

TOUSSAINT Jean-Philippe

Début mélancolique : le récit annoncé se terminera par une rupture, issue prévisible depuis Faire l’amour (NB novembre 2002). Mais pour le moment, dans une canicule plombée, le narrateur arrive à Shanghai. Passif, il se laisse conduire d’hôtels minables en gargotes par un guide tyrannique et une séduisante Chinoise. D’incertaine, la situation devient vite accablante : le père de son amie Marie vient de mourir à l’île d’Elbe, ses compagnons trafiquent dans la drogue, la police les poursuit… Néanmoins, il parvient à Elbe à temps pour l’enterrement, sans retrouver l’amour de Marie dévastée par le chagrin. Sinon, peut-être, dans une mort commune. Le narrateur, cependant, est encore là pour raconter.  Au début, l’ironique précision des détails se dilue dans la chaleur, la saleté chinoises. Puis, surpris par la passivité du narrateur, dépaysé avec lui, le lecteur s’englue lentement dans l’étrange atmosphère, faussement touristique. Enfin, pendant l’enterrement, le ton change, la chaleur fait vibrer en halo le bonheur disparu, les détails blessent la mémoire et l’impuissance du héros prend une ampleur tragique. Une écriture subtile, des effets presque toujours réussis orchestrent ce crescendo.