En 1941, Susie Wekler a neuf ans lorsque les Allemands envahissent Wilno (aujourd’hui Vilnius), « la Jérusalem du nord » alors polonaise, où un quart de la population est juive. Elle appartient à une famille aisée. Après les premiers pogroms, elle est enfermée avec sa famille dans un premier puis un second ghetto (1942-1943), est embarquée avec sa mère dans le camp de Kaiserwald puis du terrible Stutthof en Poméranie (fin 1944) et épuise ses dernières forces lors de « la marche de la mort » à la liquidation du camp. Alors qu’elle se bat contre le froid, la faim, qu’elle est couverte de poux, et parfois d’excréments et de vomi, elle écrit de petites poésies et, grâce à sa mère admirable, ne devient pas un « musulman » (un déporté agonisant qui renonce à se battre).
Schoschana Rabinovici raconte les horreurs qu’elle a subies, de plus en plus effroyables au long des quatre années, telles qu’elle les a perçues avec ses yeux d’enfant, bien que ce ne soit qu’en 1991 qu’elle ait écrit ce récit, en hébreu, après la mort de sa mère. Un important appareil critique restitue le contexte historique compliqué de la vie dans les ghettos d’Europe orientale. Un témoignage factuel saisissant, d’autant plus bouleversant que dépourvu de toute acrimonie. (C.P. et A.-M.G.)