1999, Zagreb. La petite équipe de basket de Devescak a créé la surprise en se qualifiant pour la finale du championnat junior de Croatie. Elle affronte le favori. Assis, terrifié, suant, le jeune Frano attend d’entrer dans le jeu. Debout au banc de touche, tel un dément, l’entraîneur Dario pousse, crie, engueule ses joueurs pour qu’ils donnent le meilleur d’eux même, repoussent leurs limites. La tension de la compétition au score très serré fait renaître chez lui les scènes cauchemardesques de guerre vécues pendant les combats de Vukovar huit ans plus tôt entre Oustachis et Tchetniks. À la mi-temps, Dario vocifère : l’équipe est distancée de dix points. Sont-ils rattrapables ? Frano peut-il y contribuer ?
Quelle force dans cet album! D’autant plus crédible que le joueur luttant contre son angoisse n’est autre que l’auteur lui-même. C’est sa propre histoire qu’il raconte. Le récit entremêle déroulé du match, séances antérieures d’entraînement, souvenirs anciens d’héroïsme ou de lâcheté des deux protagonistes. Le graphisme ajoute à la violence par la nervosité du trait, l’expressivité des visages et des attitudes, le dynamisme de la mise en page, la variété des cadrages, le contraste des colorations. Ainsi se construit un puissant parallèle entre le sport et la guerre. Pour les deux, il faut savoir aller jusqu’au bout de soi, vaincre sa peur et jouer la solidarité. Là est la vraie victoire. Une BD saisissante et poignante.