Quatre personnages se rencontrent au coeur de nuits madrilènes et leur existence change de cours. Un chauffeur de taxi vient de perdre sa femme, atteinte d’un cancer. Le médecin qui l’a soignée, que seul l’univers virtuel de Second Life sort encore de sa torpeur, n’éprouve plus que lassitude pour sa vie, son métier. Une dame âgée, autrefois brillante scientifique, noie ses peurs dans l’alcool. Une jeune prostituée noire, prise dans les rêts d’un monstrueux proxénète, s’estime heureuse d’avoir un jour pu échapper aux guérilleros du Sierra Leone.
Derrière le titre qui semble annoncer un essai, apparaît un roman nocturne, presque « noir », où l’humour et l’espoir côtoient sur un ton distancié une violence très âpre. Dans une belle écriture, Rosa Montero dénonce avec dérision les travers de la société, offre de Madrid de saisissantes descriptions. À l’instar de La Fille du Cannibale (NB avril 2006), elle fouille les âmes avec finesse, analyse le déni, les doutes, la détresse, et trouve cependant, profondément enfouie en chacun, cette part de lumière qui, aussi mince soit-elle, peut « changer le monde ».