1955. Rose Zimmer, New-yorkaise entre deux âges. Elle est juive, envahissante, contestataire et ardemment communiste. Elle a épousé un Allemand, Albert, ils ont eu une petite Miriam. Albert, encore plus rouge que Rose, est parti en RDA jouer les espions. Rose, esseulée, multiplie les aventures et est chassée du Parti parce qu’un policier noir est son amant. Son rêve se fissure. Sa fille, brillante, rebelle, mène la vie des protestataires hippies des années 70. Plus tard, Sergius, le petit fils musicien, confusément utopiste, tente de fuir le militantisme. Les trois générations entremêlent leurs relations. Dense, mordant, échevelé, torrentiel, parce qu’il charrie, dans un flot impétueux, une foule de personnages à des époques différentes, sans ordre chronologique, le long roman de Jonathan Lethem (Chronic City, NB mars 2011) bouscule. Parce que, sous la luxuriance et la plasticité du verbe, filtre un vague apprêt un peu fat, il agace parfois. Mais on retient la puissance évocatrice des trois héros principaux, visages divers et complexes de la dissidence à travers trois âges dans un New York insolite. Et dans ce chaotique voyage transgénérationnel, dans lequel s’enchevêtrent psychologie et sociologie, souffle de temps à autre quelque chose d’épique. (D.C. et C.R.P.)
Jardins de la dissidence
LETHEM Jonathan