Je suis venu tout seul

Le jeune Rémy Doury vient souvent sur la tombe de son frère Victor. Il lui parle, lui récite un poème, se promène dans le cimetière paisible devenu un lieu familier. Rémy explore les tombes, note ses appréciations de un à dix dans le petit carnet intime qu’il ira déposer dans une cachette, entre un banc et un muret. Les années passent, les visites s’espacent…Le papier glacé noir, caractéristique de la collection, convient à ce texte superbe sur le deuil. L’écriture blanche cursive, les dessins : gouttes de pluie, bouquet de fleur, vélo qui roule sont quant à eux des signes de vie. Page après page, l’enfant se fixe une action : nettoyer, arroser, lui parler, se promener et enfin vivre, dernier infinitif qui achève une démarche rituelle pour maintenir le lien, tout en mettant la douleur à distance. La solitude s’apaise, les amis de l’école et leurs réactions peuvent être entendus. Délicat et poétique, ce témoignage d’un apprivoisement du deuil dans la solitude, avec toujours la mère en arrière plan, se lit dans le silence et une grande émotion.