Cheville ouvrière du roman de Jerome Charyn sur la Révolution américaine, Johnny Bel-Œil est le narrateur, tous azimuts, de quelques pages d’Histoire qui, entre 1776 et 1783, ont marqué, entre autres lieux, l’île de Manhattan. Agent double, à son insu, il navigue entre rebelles et loyalistes dans le sillage de George Washington. Son port d’attache est un bordel de Manhattan, unanimement fréquenté par les factions ennemies, le général américain en tête, qui n’est pas insensible au charme de sa tenancière rousse. Lui, c’est une de ses pensionnaires, intrépide octavonne, aux yeux verts, qui lui a pris le coeur…
Pendaisons, assassinats, emprisonnements, bastonnades, les menaces pleuvent à un rythme forcené… L’auteur mène, allegro furioso, son récit échevelé, mêlant personnages réels et personnages fictifs. De quoi perdre le fil ici et là et devoir se reporter aux trois pages liminaires du volume détaillant la liste des protagonistes de cette épopée. Effrénée. Enfant du Bronx (cf. C’était Broadway, NB février 2006), Jerome Charyn rêvait depuis l’âge de neuf ans d’écrire la légende de la Révolution. Il lui a fallu plusieurs décennies pour trouver le ton et le souffle de ce volumineux morceau de bravoure picaresque.