Pour rendre à Marx sa vraie place dans l’histoire des idées, l’auteur souligne son immense culture philosophique, historique, économique et littéraire et son apport principal, les outils d’analyse d’une société. Polyglotte, travailleur acharné, cet éternel réfugié fut le témoin éclairé de la révolution industrielle, et avec Engels créa la « Première Internationale », préparant l’organisation du mouvement ouvrier. Écrivain infatigable et journaliste acerbe, il vécut pauvrement, financé par Engels, eut beaucoup d’ennemis dans les cercles révolutionnaires. Plus théoricien qu’acteur du changement, il envisageait une émergence pacifique du pouvoir du prolétariat, à la différence de ses successeurs qui ont dénaturé sa doctrine, complétant une oeuvre vaste mais inachevée.
Excellent connaisseur des pays anglo-saxons, Bernard Cottret souligne la défiance réciproque de Marx et de la classe ouvrière anglaise, organisée et pragmatique. L’étude du contexte philosophique, historique et économique est exhaustive et éclairante, l’évolution du penseur retracée avec précision. Cet ouvrage d’historien révèle un Marx inattendu, bourgeois, humaniste, russophobe, américanophile… Comme L’histoire de la Réforme (NB mars 2001), ce travail d’un esprit libre est très documenté, vivant et convaincant.