Arrivée avec l’hiver et le bus, elle n’est pas seule; elle a des bottes, pull, écharpe et bonnet… et tous ses sacs. « C’est un énorme tas, une baleine échouée sur le trottoir-banquise ». Cette SDF installée sous l’abri du bus 29 devant lequel chacun passe, indifférent, polarise l’intérêt d´Alice. D’un échange de sourires, qui ne coûtent rien, à un croissant offert, s’instaure peu à peu une connivence entre ces deux êtres . Alice semble sortie de l’oeuvre de Lewis Caroll, et la Mère Noëlle un mythe féminisé. L’une réalise de ses mains potelées des pliages pour voyager sur les flots ou dans les airs, l’autre écrit des poèmes sur les mêmes bouts de papier.Christine Beigel reprend l’écriture sur les quadrillages, courbes et obliques d’un album précédent La petite fille qui marchait sur les lignes, donnant du mouvement au texte comme aux personnages. C’est un petit bijou de poésie et de tendresse qu’illustrent des trouvailles telles « la tartine à la confiture d’étoiles » ou « le croissant de lune qui a le goût de la nuit ». Les illustrations tout en transparences, jouent sur différentes textures de papiers pour les pliages; les feuilles d’arbres givrées dévoilent leur réseau de nervures, et le corps blanc marbré évoque la technique du raku. Les poissons évoluant dans des paysages oniriques rappellent ceux du Carrousel des mondes marins à Nantes. (M.-C.D.)
La baleine du bus 29
BEIGEL Christine, BRAVO Alessia