Autour d’un récit grec du Ier siècle de notre ère qui raconte les métamorphoses d’un jeune berger, s’articule le destin de cinq personnages, dans des époques et des lieux différents : pour le futur, une adolescente embarquée sur un vaisseau spatial ; pour le passé, une jeune Chrétienne dans Constantinople assiégée par les Sarrasins et un paysan difforme enrôlé par le sultan ; pour le présent, un orphelin fragile et dangereux qui vit dans l’Idaho, où un ancien combattant de Corée met en scène les aventures du berger avec de jeunes élèves.
Gros roman ambitieux, parfaitement maîtrisé, du brillant conteur Anthony Doerr, prix Pulitzer pour Toute la lumière que nous ne pouvons voir (Les Notes mai 2015). Personnages bien campés et sensibles, rendu suggestif de la nature et des lieux : on croit y être et en être, avec l’envie d’aller plus avant. Le fameux codex, qui traverse la vie des héros et les relie, nous plonge dans la culture grecque ancienne (Homère), fait l’éloge des livres, et dégage une quête du bonheur très humaine. Quantité de graves questions sont abordées sur un ton juste : horreurs de la guerre, frustrations, ravages de la vieillesse, saccage de la nature, vertiges du métavers… sans jamais casser la dynamique impulsée par l’auteur. Magique et très original. (L.K. et A.Le.)