Obèse et solitaire, Rac trace un sinistre portrait de sa mère trompée par un mari séducteur. Il vit entre Constantine et Alger et ressasse les horreurs commises par les Français contre son pays depuis la colonisation. Il est fortement impressionné, chez l’oncle Ismaël, par deux oeuvres d’art : une miniature d’Al Wacity du XIIe siècle, montrant les troupes arabes à la conquête de l’Espagne, et La Place du gouvernement à Alger d’Albert Marquet. Celui-ci est un ami très proche de sa famille. Rac lui voue une admiration sans bornes ; il a aimé l’Algérie ! Marquet a possédé à Alger une villa confisquée et détruite par un fonctionnaire corrompu. Poète, scénariste, écrivain (Hôtel Saint-Georges, NB avril 2011), Boudjedra critique violemment la présence française en Algérie, de la colonisation jusqu’à nos jours, exprimant sa rage contre les Blancs et sa sympathie pour les Juifs persécutés sous Vichy. Il mêle ses obsessions anti-françaises et familiales – un frère dont on l’a privé – en un va-et-vient incessant entre passé et présent soulignant le contraste avec la gloire passée des conquérants musulmans. Son évocation de Marquet est intéressante et un beau style, charpenté, coloré et évocateur, tempère le fiel et la rancoeur. Mais ses répétitions en boucle finissent par lasser. (S.La. et A.Be.)
La dépossession
BOUDJEDRA Rachid