Réfugié avec ses derniers fidèles dans une école désaffectée de Syrte, complètement ravagée, Kadhafi croit encore à sa bonne étoile, alors que les rebelles, appuyés par l’aviation des coalisés, resserrent leur emprise. Envahi de cauchemars, drogué à l’héroïne, physiquement et nerveusement à bout, il torture moralement son entourage, le provoque et le menace, qu’ils soient chefs de son état-major ou membres de son personnel. Entre ordres et contre-ordres, il revoit sa vie passée. Sa fuite ultime tourne au fiasco et lui réserve une fin lamentable. Yasmina Khadra (Qu’attendent les singes, NB juin 2014) ne mâche pas ses mots dans le portrait au vitriol qu’il fait du Raïs, le hissant au rang d’autres dictateurs tristement célèbres. Comment le jeune bédouin, devenu à vingt-sept ans le père de la révolution chassant les bourgeois corrompus du régime royal pour instaurer la justice, est-il devenu ce mégalomane sanguinaire ? Ce n’est pas tant la réponse à cette tragique déviance qui intéresse l’auteur, mais la folie d’un homme qui méprise ses semblables, hommes et femmes, et s’enfonce dans son délire narcissique. Il y a des images fortes, une bonne connaissance du contexte, mais des dialogues plus faibles qui nuisent à l’ambition du récit. (L.K. et A.Lec.)
La dernière nuit du Raïs
KHADRA Yasmina