La faucille d’or

À quarante-cinq ans, le journaliste d’investigation David Bourricot croule sous le poids de blessures anciennes et du naufrage annoncé de son couple. Pour ne plus le voir s’enfoncer dans la morosité et l’à-quoi-bonisme, son rédac chef inquiet lui concocte la mission de la dernière chance : un reportage en pays bigouden sur la disparition en mer, mal expliquée, d’un marin-pêcheur. Du réchauffé, mais pour pimenter la chose il lui souffle de s’intéresser à la consommation et au trafic de drogues dures parmi les hauturiers bretons. David, pas dupe, mène mollement son enquête dans les bars de Penmarc’h…

Avec son détective-reporter alcoolisé et déprimé, le troisième roman d’Anthony Palou (Fruits et légumes, Les Notes septembre 2010) a des allures de polar psychologique. Puis l’humour pince-sans-rire et les personnages secondaires fantaisistes tirent la comparaison vers une Série Noire parodique et populaire. Mais finalement, c’est la coloration introspective poignante qui domine dans ce sombre portrait d’un homme sans illusions, à bout de course. Équilibre réussi entre dérision-farce et émotion-poésie, entre images déformées par la fantaisie et jeux de mots décalés, entre naïveté feinte et érudition littéraire véritable. Dorénavant, quand vous commanderez une « assiette du pêcheur », demandez-vous de quoi se nourrissent les crabes ! (T.R. et A.Be.)