La longue route de Little Charlie

CURTIS Christopher Paul

Caroline du Sud, 1858. Mort d’un stupide accident, le père de Little Charlie, 12 ans, laisse une dette contractée auprès du Captain Buck, qui la résout à sa façon. Il tue la mère de Charlie, et oblige le gamin à l’accompagner dans le Nord à Détroit, pour aller, comme les lois du Sud l’autorisent, récupérer trois esclaves qui ont réussi à s’enfuir. Dans cette ville, Captain Buck fait emprisonner immédiatement les deux esclaves en fuite. Mais il faut ensuite passer de l’autre côté du lac, au Canada, à la recherche de leur fils…

Une ambiance à la charnière entre le Nord et le Sud des États-Unis au milieu du XIXe siècle, divisés entre racisme, esclavagisme et ouverture à la notion de liberté des Noirs, souvent conquise au cours de fuites périlleuses. Dans cette sorte de road movie suivi au plus près de deux personnages représentatifs des communautés qui s’affrontent, le récit est transmis par Little Charlie, fils un peu benêt de « petits Blancs du Sud », qui s’exprime avec la verdeur et la naïveté de son langage familier. Entre le gamin pas très futé et la brute épaisse, le face-à-face génère une réflexion d’autant plus percutante qu’elle traduit le point de vue d’un jeune qui ouvre peu à peu les yeux sur le racisme ambiant. De l’emprise physique et morale au geste libérateur pour les trois esclaves et le narrateur, la route est longue et le voyage initiatique de Little Charlie confronte le lecteur aux racines actuelles d’un mal ancré dans le passé. (M.T. et A.T.)