Le vent et les vagues rongent inexorablement les falaises dâAlburgh sur la cĂŽte Est de lâAngleterre. Ludwig a vĂ©cu ici avec Marthe, sa mĂšre sculpturale et secrĂšte. AprĂšs sa mort, il y revient, sây arrĂȘte un temps. Les rĂ©miniscences de sa jeune vie mouvementĂ©e le submergent. Il revoit lâenfance Ă Alexandrie, le dĂ©part du pĂšre, la relation Ă©troitement troublante avec Marthe, lâinstallation dans une maisonnette au bord du gouffre, le surgissement du passĂ© ravageur de la mĂšre, la confrontation dĂ©vastatrice avec le pĂšre, et ce piano qui le fait survivre, Ă Los Angeles, Ă Vienne, aux Pays Bas. Comme dans Joe Speedboot (NB juin 2008), un traumatisme change le cours dâune destinĂ©e. Sensuelle, imprĂ©gnĂ©e de sons et dâimages, parfois crue jusquâĂ lâinsoutenable, lâĂ©criture excelle dans lâĂ©vocation des lieux et des personnes. Lâutilisation du « je » filtre ou densifie les souvenirs, Ă©lude ou accuse, introduisant dans lâhistoire une dimension dâautodĂ©rision, dâamertume, de fiel ou de tendresse. Complexes et imprĂ©visibles, les diffĂ©rentes personnalitĂ©s donnent une Ă©tonnante prĂ©sence aux hĂ©ros. Pas de lumiĂšre dans l’Ă©vocation d’existences dĂ©racinĂ©es sans perspective, mais une rĂ©elle puissance qui rend le lecteur captif dâun rĂ©cit largement mĂ©taphorique.
La Maison engloutie
WIERINGA Tommy