La mort est une corvée

KHALIFA Khaled

Damas, époque actuelle. Boulboul accède à la prière d’Abdellatif, son père mourant : être enterré dans son village natal, ‘Anâbiyya, au nord d’Alep. Il contacte sa soeur Fatima et son frère Hussein qui possède un microbus. Obtenir les papiers nécessaires est une première difficulté, s’engager dans un parcours de 250 kilomètres dans un pays en guerre reste une gageure quand on doit franchir les postes de contrôle des multiples factions politiques ou confessionnelles en subissant humiliations et corruption. Le corps transporté se décompose, les trois voyageurs, dissemblables, ne s’entendent guère et ‘Anâbiyya se trouve en zone insoumise.  Khaled Khalifa, romancier syrien libre (Éloge de la haine, NB mars 2011), livre non seulement une vision de l’existence journalière dans un pays où la mort est omniprésente, mais s’attache à la psychologie et à la vie des personnages. On entrevoit les amours, les rancoeurs, les vaillances et les défaillances de chacun. On perçoit ce que fut jadis la vie dans ce pays, l’existence des liens tribaux et la solidarité clanique qui subsistent. Le passé d’Abdellatif dans l’opposition au régime est un obstacle pour le passage d’une obédience à une autre. Un road movie kafkaïen et un beau témoignage qui respire l’authenticité. (M.F. et H.V.)