La mouette au sang bleu

BOUÏDA Iouri

Fin de la première guerre mondiale. Tchoudov, petite ville proche de Moscou, a un pied dans la Russie ancestrale et l’autre dans le régime soviétique. Tout semble extravagant et bancal : appartements, habitants, monuments, coutumes… Ida Zmoïro – père commandant d’une curieuse armée de brigands, mère ex-prostituée – est absolument sûre de son talent de comédienne. Elle s’échappe à Moscou. Un jour, en effet, elle sera félicitée par Beria et Staline pour son interprétation de La Mouette. Mais la roue tourne : défigurée, elle doit retourner à Tchoudov. Le jeune Aliocha, son voisin, écoute avec passion les récits de son passé glorieux et de ses échecs. Iouri Bouïda (Potemkine ou le troisième coeur, NB février 2012) s’inspire d’assez près de la longue vie de Valentina Karavaeva, immense vedette en 1942 du film Machenka. Était-elle aussi excessive, rigoureuse et « folle » que l’héroïne du roman ? D’autres personnages sont réels, mais Tchoudov est imaginaire. L’histoire, parfois délirante, doit autant aux contes traditionnels qu’au réalisme fantastique. S’y mêlent brutalité, trivialité, beauté, fragilité, causticité, humour… à travers une écriture originale et puissamment évocatrice. Un roman très russe et très foisonnant qui demande de l’attention ; elle sera récompensée. (C.-M.M. et M.-C.A.)