En 1598, des pèlerins espagnols viennent à Rome s’incliner devant le pape Clément VIII. Parmi eux, un carme venu d’Avila pour apprendre de ses pairs les pratiques de l’Inquisition. Dans la Ville Sainte il étudie l’italien et les méthodes permettant de piéger les hérétiques, puis de déceler la véracité de leurs propos lorsqu’ils cèdent sous la torture. Sa formation terminée, on l’introduit dans la cellule de Giordano Bruno, le prêtre apostat que sept ans de prison n’ont jamais ébranlé, mais que les « confortateurs » tentent de soumettre avant sa mort sur le bûcher. Écrit en 1974 par Sándor Márai (Ce que j’ai voulu taire, NB janvier-février 2015) lors d’un exil italien, ce roman tranche sur l’oeuvre du grand écrivain hongrois. Sur un ton faussement innocent, il explore les interrogations qui s’insinuent dans l’âme d’un religieux. Confronté aux rouages de l’Inquisition mis en place pour combattre ceux qui mettent en doute les dogmes de l’Église, le moine découvre l’horreur du système. Humaniste, témoin des atrocités des régimes totalitaires, l’auteur établit un évident parallèle avec les exactions perpétrées au XXe siècle. Pour un apôtre de la liberté de pensée, nazisme et communisme s’apparentent au Saint-Office. L’écriture est superbe, et la leçon, sans appel. (P.H. et S.La.)
La nuit du bûcher
MÁRAI Sándor