Seule sur un banc Ă la tombĂ©e de la nuit, perdue en plein Paris (Ă proximitĂ© de la station de mĂ©tro Montgallet), EloĂŻse sort dâune torpeur Ă©trange et rĂ©alise qu’elle ne se souvient plus de rien. Elle a oubliĂ© jusqu’Ă son nom, son adresse et son histoire, et n’a pour seuls indices qu’un sac Ă main et les quelques objets usuels qui sây trouvent. Elle va devoir reconstituer le fil de ce qui lui est arrivĂ©Â : retrouver son appartement, dĂ©couvrir ses voisins, rĂ©apprendre son travail Ă la librairie, sans toutefois avouer Ă son entourage le trouble qui lâagite. Seule une collĂšgue de bureau et des mĂ©decins peu attentifs seront sollicitĂ©s sans beaucoup de succĂšs. Bref, elle sâengage sur le long chemin presque solitaire de la dĂ©couverte de lâautre, celle quâelle Ă©tait, pour enfin trouver celle quâelle est.
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Ce roman graphique, bel objet joliment reliĂ©, est le rĂ©sultat d’une collaboration inĂ©dite. Il pose la question existentielle au lecteur: que faire lorsqu’on ne sait plus qui l’on est ? quels risques prend-on en dĂ©cidant d’enquĂȘter sur soi ? Ă partir d’une situation qui peut paraĂźtre angoissante, s’Ă©labore une intrigue riche, une narration misant surtout sur le comique de la situation, et les possibilitĂ©s crĂ©Ă©es par ce vide de mĂ©moire. EloĂŻse, si elle a tout oubliĂ©, a nĂ©anmoins gardĂ© une sensibilitĂ© et une imagination intactes qui lui permettront en plusieurs Ă©tapes du rĂ©cit dâexprimer ses sentiments devant la dĂ©couverte de lâinconnu. Ainsi, la sĂ©quence rĂ©vĂ©lant ses fantasmes, au moment oĂč elle va rouvrir pour la premiĂšre fois la porte de son appartement, est-elle jubilatoire. Et aussi la redĂ©couverte de la librairie et des contacts avec la clientĂšle. Le style graphique est fluide, agrĂ©able, avec de belles ambiances colorĂ©es et une ligne dynamique. Lâentourage, dĂ©crit de maniĂšre rĂ©aliste, offre la rĂ©plique Ă une EloĂŻse jeune, volontaire, dĂ©peinte avec verve par des auteurs qui aiment son personnage. Un pur moment de fraicheur.