Depuis trente ans, le cinéaste franco-cambodgien Rithy Panh (L’élimination, NB février 2012) revient inlassablement sur le génocide perpétré par les Khmers rouges qui exterminèrent près de deux millions de Cambodgiens entre 1975 et 1979. Il a survécu, mais une grande partie de sa famille fut engloutie. Dans la culture khmère, la mort violente condamne les âmes privées de sépulture à errer indéfiniment et il se considère comme fautif de ne pas savoir où ses parents ont été enterrés.
Écrit avec son complice Christophe Bataille, dans un style aussi poétique que poignant, ce petit livre raconte sa quête, caméra au poing, pour retrouver ces tombes qui n’existent pas, dans le calme apparent d’une nature « prospère et vide », naguère théâtre des pires abjections. Rithy Panh revient sur les lieux des crimes et revit la monstruosité inhumaine des événements. Il filme les survivants et les bourreaux, notamment Duch, chef du camp S21, machine de mort de la République populaire du Kampuchéa démocratique à Phnom Penh. Les deux auteurs égratignent au passage la France qui a nourri leur idéologie et dénoncent les différentes formes du négationnisme. À lire. (H.V. et D.D.)