La part inventée

Sur une plage, un petit garçon frôle la noyade tandis que ses parents sont absorbés par leurs problèmes de couple et la lecture de Tendre est la nuit de Scott Fitzgerald. L’enfant, devenu le Garçon, gardera toujours le souvenir de ce moment fondateur, qu’il utilisera comme source de reconstruction du passé. Suit alors, par bribes échappant à toute chronologie, la tragédie : les parents disparus dans la terrible répression en Argentine, l’Écrivain et sa soeur cadette, Pénélope, devenue folle et meurtrière.    Ce long roman qui s’analyse en s’écrivant, fascinant et déroutant, utilise les multiples facettes de la création romanesque, du réalisme à la fantaisie, dans les thèmes comme dans l’écriture et la composition, complexes. Rodrigo Fresán (Histoire argentine, NB mai 2012) intègre des personnages dans des situations absurdes ou vécues, des lieux imaginaires et symboliques, des dialogues avec les romanciers et musiciens américains qu’il aime. Reprenant dans tout le roman la métaphore d’un jouet à la mécanique inversée, l’auteur aborde le roman comme une libre réécriture du passé, La part inventée, intrigue et style concourant à un nouveau langage. Un livre-monde qui invite à une navigation en haute mer, apparemment hasardeuse, mais en réalité très maîtrisée. (M.M. et A.Le.)