Dans une ville espagnole, à la fin du siècle dernier, un groupe d’amis loue un local pour se réunir, travailler et s’amuser : un débarras en sous-sol, qu’ils transforment en l’insonorisant et supprimant toute lumière. Là, protégés par l’anonymat, dans le silence, on se défoule, ensemble, le samedi… Puis ces jeunes en pleine ascension sociale vivent des moments difficiles, douchés par la crise économique et la pièce devient un refuge. Certains des amis révoltés prennent des vidéos clandestines grâce à leur ordinateur, jouent les justiciers pendant que d’autres s’effondrent. Une fois découverte par la police, la pièce change de sens. Minutieusement décrit, le lieu-titre est obsédant : y sont confrontés les couples tentant de se construire, les jaloux. On peut aussi le voir comme un piège qui abolirait le temps, et internet y contribue fortement qui permet aux époques de se télescoper. Mais qui a piégé qui ? Sorte de parabole, paradis d’avant la chute, la pièce dégénère, se pollue en même temps que le groupe se désagrège devant la disparition de son rêve de bonheur matériel. L’auteur, alors, devient moraliste et stigmatise l’immaturité de ceux qui rêvent que tout redevienne comme avant. Intéressant, intrigant. (E.B.)
La pièce obscure
ROSA Isaac