La pluie, avant qu’elle tombe

COE Jonathan

Convaincue que pour se forger une identité, chaque être doit savoir d’où il vient, Rosamond décide, avant de mourir, d’enregistrer au magnétophone l’histoire de sa famille. Destinée à Imogen, une petite nièce aveugle, confiée, enfant, à des parents adoptifs après que sa mère a été déchue de ses droits, cette tâche est sacrée pour elle. Il faut dire qu’elle a très bien connu Beatrix, la grand-mère d’Imogen, sa cousine germaine (chez qui elle a vécu en 1939, quand les enfants des villes ont été massivement transférés à la campagne), puis Théa sa mère… Elle a ainsi plusieurs fois été témoin du dédain, voire de la haine que, de mère en fille, chacune vouait à sa descendance.

 Jonathan Coe construit son récit autour de vingt photos prises entre le début de la guerre et les années quatre-vingt. Chacune est minutieusement décrite. Personnages et lieux s’animent sous la fluidité suggestive de son verbe. La tonalité sombre de l’ensemble (aux antipodes de Bienvenue au club, N.B. mars 2003) s’adoucit lorsqu’il dépeint la campagne anglaise. À l’insoluble question de la transmission des erreurs fait écho en sourdine l’espoir « d’une cohérence, d’un ordre à déchiffrer ».

 A.D. et E.B.