La plume

LE BEC Gwendal

Grand émoi dans la basse-cour, ce matin : au sortir du poulailler, les volatiles estomaqués découvrent un dindon, la tête emplumée, comme jadis les merveilleuses. Il en faudrait plus pour troubler leur appétit matinal ; mais l’original de décréter que désormais nul ne pourra sortir tête nue. Et de faire campagne, jour après jour, et de gagner des adeptes, et d’imposer, en plus du couvre-chef, des rituels aussi bizarres que contraignants. Tant pis pour les récalcitrants !  Entre les deux camps, c’est bientôt la guerre. Mais pas de poulailler sans renard à l’affût….

Pour ce conte moral et politique, un texte intelligent, écrit dans une langue soutenue, élégante. Le choix des mots à double sens donne à la fable animalière sa richesse d’interprétation : de l’extravagance à la norme, le chemin est vite parcouru, celui des modes absurdes ou des dogmes meurtriers. Le sérieux du propos ne plombe pas la lecture : l’histoire est drôle, le récit rebondit jusqu’à l’éclat de rire de la chute. L’humour des images saute aux yeux dans le parti pris irréaliste du choix des couleurs et dans les postures des personnages. Ce n’est pas le moindre charme de cet album.