La Punaise

MARAIS Frédéric, DEDIEU Thierry

La punaise Ă©tait lĂ , sur son bureau. L’Ă©lĂšve la chasse d’une pichenette , rate la corbeille et voilĂ  qu’elle atterrit sur la chaise du maĂźtre, pointe en l’air. Il fulmine, le coupable reste muet et voilĂ , de dĂ©rapage en dĂ©rapage, la planĂšte bouleversĂ©e. Le directeur arrĂȘte l’Ă©cole, le maire arrĂȘte la ville, le dĂ©putĂ© arrĂȘte la rĂ©gion, le prĂ©sident alerte ses collĂšgues. Les dirigeants se rĂ©fugient dans leur bunker. Plus rien ne fonctionne, les Ă©lĂšves peuvent Ă©couter la Terre respirer, et comme personne ne signale que le coupable a finalement levĂ© le doigt et reçu le sermon appropriĂ©, il ne reste plus qu’Ă  aller Ă  la pĂȘche.Car si on arrĂȘte tout, la neige revient sur les sommets et l’eau dans les riviĂšres. Cette fable express est mise en scĂšne dans les aplats Ă©nergiques de Thierry Dedieu en noir et blanc sur fond de couleur : vert amande pour l’Ă©cole et la riviĂšre oĂč un pĂȘcheur nonchalant bouquine, un fil de pĂȘche accrochĂ© au gros orteil. L’idĂ©e est simple et sĂ©duisante : profiter du monde loin des villes aux rues labyrinthiques, aux immeubles Ă©crasants sur fond orange. Des cadrages serrĂ©s attirent l’attention sur la chaise et la punaise, la mĂąchoire indignĂ©e du maĂźtre. On gagne le ciel pour contempler la mer noire et les bateaux en silhouettes blanches. Un dirigeant affolĂ© erructe une noire fumĂ©e, panache symbolique de la pollution. Les prĂ©sidents accablĂ©s, recroquevillĂ©s sur leur serviette, se terrent dans leur bunker – conscients de leur responsabilitĂ© ? Écolo ? Oui. Rigolo ? Tout autant, pour petits et grands et alimenter les discussions.