Il revient des tranchĂ©es â en 1919, seulement â immense, Ă©trange, hantĂ© par ce quâil a vĂ©cu, il retrouve le domaine familial qui attend son maĂźtre depuis des annĂ©es, la mĂšre, le frĂšre et la jeune fille promise.  La narratrice aimait tellement ce grand-oncle⊠Elle le fait revivre en puisant dans ses souvenirs et dans les rĂ©cits que sa grand-tante faisait inlassablement Ă la petite fille quâelle Ă©tait, pour quâelle assimile, Ă son rythme, lâhistoire familiale et ses secrets. Soazig Aaron, huit ans aprĂšs le magnifique Non de Klara (NB avril 2002, Bourse Goncourt du premier roman.), pose toujours la mĂȘme question : comment vivre en revenant de lâhorreur ? Ce roman est une rĂ©ponse. Vivre aprĂšs lâhorreur, câest pouvoir dire. Câest Ă©crire le livre de la mĂ©moire comme elle revient, foisonnante et dans un dĂ©sordre qui nâest quâapparent, comme elle se transmet, puis, comme on sâen libĂšre en trouvant les mots justes de la parole et de lâĂ©criture. Et quelle Ă©criture ! Pleine dâhumour et de poĂ©sie, souvent au conditionnel hypocoristique, ainsi sâexpriment les enfants lorsquâils jouent. LâĂ©criture est au service de la finesse des personnages et rebondit dans un inĂ©puisable vocabulaire, glanĂ© par une collectionneuse de mots. Le trĂšs grand roman de la parole entre les gĂ©nĂ©rations. Un demi-siĂšcle dâune vie ancrĂ©e dans notre Histoire.
La sentinelle tranquille sous la lune
AARON Soazig