L’Agfa Box : histoires de chambre noire

GRASS Günter

Quatre femmes, huit enfants : bilan familial, chambre noire dont Günter Grass devenu vieux entrouvre la porte. Après son autobiographie Pelure d’oignon (NB décembre 2007), il invite (en imagination) ses enfants adultes à vider les sacs du passé, avec ses mots à lui. Huit repas – goulasch ou pot au feu – les rassemblent, chez l’un, chez l’autre. L’un, puis l’autre, évoque bonheurs et amertumes, chiens et cheval, vieilles grandes maisons habitées et quittées, père absent dans l’écriture… Leur lien à tous, hormis leur « p’tit père », menteur magnifique, est la Mariette. Elle les a toujours suivis, son Agfa Box sur le ventre, appareil magique qui photographiait le passé comme l’avenir et les souhaits à peine prononcés.

 

Les récits se succèdent, des retours à la ligne marquent interruptions, approbations, critiques. Miraculeusement, après quelques pages, le lecteur repère qui parle, qui intervient parmi la fratrie. Le langage truculent, les vieux codes familiaux ressuscitent avec l’enfance, les romans du père célèbre s’échelonnent, ses fantasmes captés pour lui par Mariette avec la fameuse Agfa box. Ce thème insistant, cette Marie d’une étrange poésie, symboliserait-elle le pouvoir créateur de l’écrivain ? Günter Grass n’en a rien perdu.