« Je m’étais souhaité la fin et la fin était là ». Inni est allongée dans la forêt. Elle a suivi l’homme qui l’a ramassée dans la rue, est montée dans sa voiture, devinant tout. Depuis longtemps, elle cherchait un chemin pour s’extraire du monde, attendant quelque chose ou quelqu’un et le chasseur l’a senti. Maintenant, il lui bande les yeux, et son cri est le signal…
« Que deviennent les morts lorsqu’on ne prononce plus leur nom ? ». Depuis son éternité, la jeune femme s’interroge, revient sur son chemin douloureux, scrute les vivants et les visite en rêves, évoque des amours dysfonctionnelles et des amitiés réelles. Avec la drogue, elle était morte depuis longtemps, refaisant surface avec la maternité, replongeant après l’abandon du bébé. Il y a tant de choses à voir dans ce roman qui se joue des temporalités où l’on suit la victime avant, pendant et après sa mort. Creuset où se concentrent toute la vulnérabilité, l’acceptation et finalement la peur, l’acte barbare revient sans cesse, comme un trait d’union entre les souvenirs. Il traduit chaque fois l’abandon, l’humaine rébellion et l’inéluctable soumission. L’écriture est fluide, visuelle, retenue et s’y retrouve la poésie de Beckomberga, Ode à ma famille (Les Notes novembre 2016). Il y a dans ces lignes d’une grande beauté une part de désespoir et une part de lumière et Sara Stridsberg, qui parle de la mort, parle aussi de l’amour. (Maje et S.D.)