Au cours dâune kermesse de son village, en 1954, Elisabeth se fait tirer les cartes par une cartomancienne dâun jour. Lâas de pique rĂ©veille alors en elle une foule de souvenirs. CâĂ©tait en 1920 : jeune mĂ©decin, elle sâembarque dans le transsibĂ©rien Ă la recherche de son mari dâalors, un Allemand, fait prisonnier trois ans plus tĂŽt par les Russes en Mongolie. Elle y parvient en plein conflit entre bolcheviques et rebelles Blancs. Le train est arrĂȘtĂ© et elle est menĂ©e au chef de guerre local, le Baron fou, alias Von Ungern-Sternberg dont le premier acte est de fusiller, parmi ses prisonniers, ceux qui auront Ă©tĂ© dĂ©signĂ©s par le hasard des cartes. Lâhomme prĂ©sente un visage Ă©maciĂ© au regard froid et cruel, enfoncĂ© sous un front qui repousse loin ses cheveux blonds coupĂ©s ras. Une moustache hirsute en deux pinceaux drus cache la bouche et un menton volontaire. Reconnaissant ses compĂ©tences, il lui demande de les mettre au service de sa troupe quâil destine Ă exterminer les BolchĂ©viques. Elle dĂ©couvre alors ce personnage qui, en Ă peine deux ans, devint une lĂ©gende vivante chez les Mongols.
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Dans un beau scĂ©nario romanesque, Rodolphe donne Ă connaĂźtre une figure haute en couleurs. Cet ancien officier blanc poursuivi par les Rouges, se rĂ©fugie dans les steppes oĂč il rĂȘve de rĂ©tablir lâempire de Gengis Khan. De 1920 Ă Septembre 1921, Ă la tĂȘte dâune minuscule armĂ©e, il montre sa bravoure et sa cruautĂ© dans une vĂ©ritable Ă©popĂ©e contre les Chinois et les Rouges. Il est sacrĂ© « dieu de la guerre » par les Mongols et accĂšde aux plus grands honneurs. LâamitiĂ© bizarre quâĂ©prouve Elisabeth pour cet homme qui Ă©veille le goĂ»t de lâaventure quâelle dĂ©couvre en elle, est dĂ©crite avec dĂ©licatesse. Mentionnons le remarquable travail de lâillustrateur Michel Faure, ses finesses de traits, ses visages expressifs, ses couleurs chaleureuses, ses dĂ©coupages aĂ©rĂ©s pour faire revivre cette personnalitĂ© oubliĂ©e. Un second album doit complĂ©ter lâhistoire de ce personnage qui, malgrĂ© des campagnes limitĂ©es dans le temps, laissa un impact profond dans lâesprit du peuple Mongol.