« Le code de lâart », qui connaĂźt ? Encore un ouvrage de spĂ©cialiste ou quelque mĂ©thode savante pour faire partie du cĂ©nacle ? Rien de tout cela ! Bienvenue dans un album ludique oĂč nous accueillent, en hologramme sur la page de couverture, Le RhinocĂ©ros rouge de Xavier Veilhan et le panneau de signalisation « Interdit aux poids lourds ». Le ton est donnĂ©. Page aprĂšs page, un pictogramme, une oeuvre dâart, pour le plaisir de rapprochements insolites et (im)pertinents. La signalisation routiĂšre est Ă lâhonneur : le panneau de station-essence mĂšne Ă Edward Hopper, le Fuji Yama dâHokusai sâaplatit en dos dâĂąne. Le repĂ©rage graphique des lieux publics trouve aussi sa place : le panneau de sortie dâĂ©cole accueille Tobias et lâarchange Gabriel ; dans lâespace pour bĂ©bĂ©, on peut croiser celui de Keith Haring ; si vous cherchez une chambre, pensez Ă celle de Van Gogh. Comme rien nâĂ©chappe Ă ce balisage, lâentretien des vĂȘtements, naguĂšre confiĂ© Ă La repasseuse de Degas, a son Ă©tiquetage imposĂ©. Ici on saute du coq Ă lâĂąne sans complexe !
Par oĂč commencer ? La lecture du panneau, en page de gauche, conduit logiquement Ă celle de lâoeuvre dâart, en page de droite. Lâauteur lui-mĂȘme rĂ©sume ainsi son projet : « LâidĂ©e : utiliser des panneaux de signalisation, ces images normalisĂ©es et omniprĂ©sentes dans le quotidien pour dĂ©couvrir, par association, des oeuvres dâart complexes, singuliĂšres et mĂ©connues ». Le rapprochement est souvent drĂŽle, et lâattention portĂ©e Ă lâoeuvre enrichie par le point de vue suggĂ©rĂ©. La dĂ©marche, ludique, autorise lâhumour, voire lâirrĂ©vĂ©rence ; elle stimule la curiositĂ©, loin de lâadmiration codĂ©e des musĂ©es, qui sont nĂ©anmoins rĂ©pertoriĂ©s dans une brĂšve musĂ©ographie « anachronique » en fin de volume. Certains des artistes choisis invitent dâailleurs à bousculer les codes : Daniel Spoerri dont La Douche est un « DĂ©trompe lâoeil », Georges Rousse qui habille, en fin de parcours, un couloir dâhĂŽpital. Lâart ne tombe pas dans le panneau de lâacadĂ©misme et ce florilĂšge intelligemment mis en scĂšne en tĂ©moigne. Les passerelles quâil jette entre deux types de reprĂ©sentations symboliques : le pictogramme, minimaliste, apparemment universel et lâart qui serait, lui, culturellement dĂ©terminĂ©, mettent en lumiĂšre leur parentĂ©, dans un va et vient de lâune Ă lâautre : elles sont un langage Ă©galement accessible, Ă©galement complexe.