Dans un pays d’asile, un migrant d’une République théologique tente pour la énième fois d’obtenir ses papiers. Un jour il reconnaît l’interprète : une femme qui, sous le matricule 455, a été torturée sous ses yeux alors qu’il était le colonel adjoint du Commandant suprême. Ils vont se revoir, se parler, découvrir leur passé et l’histoire de leurs deux passions amoureuses respectives, vécues dans une perpétuelle angoisse et qui les obsèdent encore. Se crée alors entre eux une étrange connivence. Dans À mon retour d’Iran (NB février 2008), Fariba Hachtroudi, journaliste née en Iran, se déchaînait contre Khomeiny. Toujours aussi engagé, ce très beau roman évite de nommer ce pays où le système ne survit que par les arrestations, la torture et les exécutions. Chaque page respire l’horreur de tomber aux mains des tortionnaires, dont les exactions sont décrites parfois avec réalisme. En récits adroitement alternés l’auteur montre comment le poison s’insinue en chacun : tout cacher, même aux plus proches, dissimuler, surveiller, se sentir épié. Impossible d’échapper à cette écriture aux phrases courtes, sans pathos, poignante, haletante tant les situations se retournent et s’enchevêtrent, effrayante par la monstruosité des assassins, bouleversante par la puissance de l’amour.
Le colonel et l’appât 455
HACHTROUDI Fariba