Flick Ă©tait un bon Allemand de lâEst, travailleur infatigable, toujours prĂȘt Ă rĂ©parer nâimporte quelle avarie dans les mines de lignite. Il a quarante-cinq ans Ă la chute du mur. Il nâexprime aucun regret du rĂ©gime passĂ©, mais la rĂ©unification a entraĂźnĂ© la fermeture de nombreuses installations, et chez lui, dans le Brandebourg, ne subsistent que des friches industrielles. DĂšs lors, et jusquâĂ sa mort, il se consacre, en compagnie de son petits-fils, Ă la quĂȘte vaine et incessante dâun travail quelconque. Sans concession, Volker Braun dĂ©crivait la RDA dans Le roman de Hinze et Kunze (NB mars 2008). Dans ce roman picaresque il souligne la difficultĂ© dâadaptation des « Ostdeutscher » aprĂšs la fusion des deux Allemagne. Mais le travail est Ă©galement le thĂšme de ce conte philosophique rabelaisien, dĂ©guisĂ© en farce tragi-comique Ă lâhumour implacable. Aucun lien Ă©vident entre les chapitres courts sinon celui du chaos de la situation de lâemploi. PĂȘle-mĂȘle, barbarismes, nĂ©ologismes, assonances, calembours, brassĂ©s avec talent dans une dramaturgie railleuse et une poĂ©tique crue, ne facilitent pas une lecture cursive. Mais grĂące Ă cette construction et ce ton entre sourire et malaise, le texte ânĂ©antisĂ©â fait rĂ©flĂ©chir et remplit ainsi son objectif.
Le grand bousillage
BRAUN Volker