Le Kremlin en sucre

SOROKINE Vladimir

Noël 2028. La petite Marfoucha court vers la place Rouge pour recevoir le Kremlin en sucre, le minuscule cadeau offert par les « opritchniks », les maîtres de la Russie, aux enfants des classes inférieures. Soucieuse d’obéir au règlement, elle dénonce ensuite les sans-abri qu’elle croise dans son immeuble et les condamne à une mort certaine. Un bouffon lilliputien amuse chaque soir les sommités du Kremlin et, de retour chez lui, s’enivre et se console dans les bras d’un robot. Des forçats, affamés et fouettés, construisent la grande muraille de Russie dans une contrée désertique.

 

Quinze récits se succèdent, sur le même ton glaçant et désespéré. Ils préfigurent une Russie à la pointe de la technologie, mais féodale dans son fonctionnement. La société est divisée entre oppresseurs et opprimés. Corruption, violence, terreur, tortures assurent la pérennité du système. Vladimir Sorokine, auteur à l’imagination délirante et au style très peu académique (Roman, NB avril 2010), use de métaphores grinçantes pour railler une idéologie politique qui a longtemps prôné le bonheur pour tous. Cette surprenante fiction apocalyptique se rit de toute censure.