Le naufrage : 16 juin 1940

Ce livre est un véritable ouvrage d’historien – à la fois alerte et élégamment écrit – moins par le récit des dernières journées de la guerre de 1940 à Bordeaux, déjà traité par divers auteurs (encore qu’on y trouve un aperçu peu connu de la position de De Gaulle sur l’armistice), que par l’analyse à la fois objective et approfondie des principaux acteurs, comme des conseillers de l’ombre de ces journées de juin-juillet 1940, de leurs parcours et de leurs motivations. On notera en particulier les portraits à la pointe sèche de Lebrun, de Laval, de Reynaud et de son égérie, Hélène de Portes, sévèrement jugée, de Georges Mandel, solitaire et mal aimé, pugnace et autoritaire, auquel Roussel rend un bel hommage. Ceci dans l’atmosphère délétère du parlementarisme dévoyé de la fin de la IIIe République, qui se nourrissait de compromis peu glorieux, du refus de toute tentative de réforme et de toute cohérence dans l’action gouvernementale, encourageant par-là même, peurs et lâchetés. En contrepoint, la dernière partie, consacrée à un « homme libre », de Gaulle, « un météore dans le ciel ravagé de la défaite », et à l’étrange action de Jean Monnet.