1982. Grec réfugié en France, Sam a conçu l’idée extravagante de monter l’Antigone d’Anouilh au Liban en guerre. Malade, il convainc son ami Georges de réaliser son rêve. À Beyrouth au cours d’un périlleux périple, Georges soumet ce projet aux différentes factions, et propose de les y associer en choisissant des jeunes acteurs dans chaque camp : Créon sera chrétien, Antigone palestinienne, Hémon druse… Pendant deux heures, la guerre serait suspendue pour une représentation unique. Tous acceptent, et une date est fixée. Mais la guerre en décide autrement. Après l’Irlande de Retour à Killybegs (NB novembre 2011), Sorj Chalandon épouse la tragédie libanaise qui, associée au mythe d’Antigone, conduit à une mission impossible bouleversante : faire jouer ensemble les frères ennemis. Dans un style très personnel avec associations de mots inattendues et percutantes, l’auteur développe une tension permanente qui va crescendo jusqu’au tragique. Il entrecroise les dates, mêle souvenirs d’enfance, bagarres d’étudiants et actualité brûlante, sans que jamais se perde le fil. Le cheminement psychologique des personnages est remarquablement traité. Le symbole du quatrième mur, façade imaginaire entre acteurs et spectateurs, rejoint le drame antique et la cruauté renouvelée des hommes. Nouvelle facette de l’immense talent de cet écrivain journaliste.
Le quatrième mur
CHALANDON Sorj