Le roman de Jeanne

YUKNAVITCH Lidia

Depuis la station spatiale CIEL gouvernée par un charlatan despote, Christine, une rescapée du formidable géocataclysme programmé par les excès des hommes et leurs guerres, observe la Terre. C’est une boule moribonde de laquelle CIEL pompe les dernières ressources par d’invisibles aéroducs. Elle se souvient d’avant, avant de devenir, avec les survivants, un corps transformé et incertain, diaphane, asexué, hermaphrodite, albinos, soumis. Elle pense à Jeanne, cette Terrienne morte (?) sur le bûcher, qui brava le dictateur. Elle veut raconter son histoire interdite pour susciter un sursaut.  Après La mécanique des fluides (NB octobre 2014), plausible autobiographie, Lidia Yuknavitch choisit pour ce dernier ouvrage la littérature fantastique. Une façon pour elle de dénoncer l’épuisement des ressources naturelles par la surconsommation, les guerres dévastatrices, l’expérimentation animale, l’irrespect de la vie sous toutes des formes. Ce roman post-apocalyptique, étrange, fantasmagorique, accusateur et futuriste est servi par une imagination foisonnante, féroce et sans limites. La plume est aisée, parfois même poétique, toujours coulante et la dimension émotionnelle apportée au récit suffit à faire oublier une fin un peu confuse. Réaliste, elle ne recule devant aucun détail fut-il trash, violent. Un roman coup de poing, qui rend poreuse la frontière entre l’humain et la matière. (C.R.P. et Maje)