Meurtrie par des absences répétées qu’elle impute à l’emprise qu’exerce sur lui sa mère, la compagne de Thomas tente de comprendre. En attendant l’être aimé, elle interroge ses proches et exorcise sa peine par l’écriture. Elle essaie de recréer la personnalité insaisissable et narcissique de la mère, une artiste paysagiste réputée qui, partie ou peut-être morte, fascine toujours son fils, ses amants, ses amies ou ses anciens élèves. La reconstitution d’un jardin chimérique imaginé par elle, à travers des plans qu’elle a savamment dispersés entre ses admirateurs avant de disparaître, est un enjeu pervers qui mène inéluctablement au drame.
La séduction mortifère que dégage ce couple mère-fils et les lumineux paysages où se noue le drame, deux villages du Sud-Ouest de la France et les îles suédoises, sont omniprésents et cependant jamais nettement évoqués. Lieux et sentiments émergent par petites touches oniriques et colorées où est volontairement abolie toute frontière entre ce qui est vécu, touché, pensé, ressenti. Parfois la narration devient plus explicite, mais pour replonger très vite dans l’opacité de l’angoisse. Ce texte est un exercice de création poétique continu, sincère, exigeant, et d’une originalité déconcertante.