Le ruisseau de cristal

En Irlande, trois femmes, trois histoires à des périodes différentes. Sandra, employée dans une manufacture, ne se liant avec personne, vit seule avec sa fille – fruit d’un inceste fraternel – qu’elle tient recluse dans la maison familiale. Ses parents sont morts, son frère a disparu. Bridget, femme de chambre à l’époque victorienne, finit folle dans un asile en mettant au monde l’enfant de sa liaison avec un jeune précepteur. Joanie vit avec sa grand-mère, sentant sur elle le poids du passé. La première histoire a déjà été publiée en 1994. Ce récit poignant, lugubre, tendre et violent, chargé d’odeurs, de chuchotements, de cris et de pleurs, se suffit à lui-même. Les deux autres rajoutés par Dermot Bolger (Une illusion passagère, NB novembre 2013) ont un lien plus évident entre eux. Le talent de l’auteur tient dans la narration de cette longue lignée d’existences aux lourds secrets, étranges instants de bonheur et de déraison, entachés d’interdiction ou d’impression de déjà vécu ; dans la description de cette Irlande de toujours, ouvrière, rurale, de sa bourgeoisie éduquée, de l’emprise d’une religion stricte et de la fougue des amours illicites. Une atmosphère prenante, mystérieuse et troublante, soutenue par une écriture riche, poétique et sensuelle.