On ne raconte pas le conte dâAndersen : tout le mode connaĂźt quel sort injuste est rĂ©servĂ© au « vilain petit canard ». Suite Ă un violent coup de vent qui sĂšme la pagaille, JosĂ©phine Colvert, quand ses Ćufs Ă©closent, se retrouve maman de cinq canetons mignons et dâun inconnu tout noir avec un bec rouge. Ses frĂšres ont tĂŽt fait de le baptiser « machin » tant lâenfance est sans pitiĂ©âŠ
La triste aventure de Machin est un vibrant plaidoyer pour ceux dont « les beautĂ©s cachĂ©es attendent dâĂȘtre rĂ©vĂ©lĂ©es », ceux qui ne croient pas en eux et sont victimes du regard, rarement positif, des autres. Ă la maniĂšre dâune fable de La Fontaine, le rĂ©cit des malheurs de Machin est suivi dâune morale qui conclut lâhistoire construite autour par une leçon de vie : une injonction Ă avoir confiance en soi. Le registre animalier contient en soi sa dose parodique et donc sa force comique. Le vilain petit Machin qui prend des libertĂ©s avec le conte ajoute savoureusement Ă ce plaisir du dĂ©calage une thĂ©ĂątralitĂ© accentuĂ©e, la ponctuation de commentaires pince-sans-rire du narrateur et la virtuositĂ© dâun rĂ©cit oĂč sâentend, comme Ă contre-emploi, la musique de la langue classique. Lâhumour et lâĂ©lĂ©gance de lâillustration Ă lâencre noire avec une touche de rouge parachĂšvent ce petit bijou. (C.B)