Après L’Aigle sans orteils (NB/LJA, sept 2005 et Pain d’alouette (NB, juin 2011), Lax termine sa trilogie consacrée au vélo par les années 40, avec L’Écureuil du Vel d’Hiv. À travers l’affection de deux frères, il évoque l’histoire mouvementée du Vel d’Hiv pendant la guerre. Sam, l’aîné, est un « pistard » adoré du public populaire. Eddie, le cadet, souffre d’une hémiplégie latérale gauche. Malgré son handicap, il s’épanouit dans l’écriture d’articles qu‘il signe L’Écureuil du surnom donné à son frère par ses admirateurs. Mais l’Histoire rejoint les histoires de vies. Le 16 juillet 1942, le stade sert à emprisonner les juifs lors de la fameuse rafle. Leur mère s’y précipite pour aider les familles qu’elle suit depuis le début de l’occupation. Ils ne la retrouveront pas malgré leurs efforts et ceux de leur père auprès de ses relations nazies. Eddie devient un journaliste résistant auteur de pamphlets antinazis. Son frère survit difficilement : le plus dur est de résister au chantage des « amis » de son père qui, parieurs avides, le forcent à truquer les arrivées des courses. Heureusement la guerre n’est pas éternelle.
Le véritable héros de cette superbe BD est le mythique Vel’d’Hiv, ce vaisseau encore ancré dans les souvenirs de ceux qui ont vibré, respiré et trépigné à l’unisson de Sam et ses concurrents, ces hommes simples, guidés dans leur vie par l’honneur et la grandeur ; de ceux qui ont souffert au même rythme que leurs familles, emprisonnées puis déportées ; de ceux qui ont eu honte devant les manifestations qui s’y tinrent à la gloire de l’envahisseur. Ce très bel ouvrage, par son scénario, son découpage et son graphisme est tout en pudeur et en colère. Son dessin à la fois dynamique, soigné et délicat, dépeint, avec justesse et émotion, l’empathie et la retenue de son auteur. Les teintes dégradées de pastel bleu et brun, estompées et lumineuses, éclairent la beauté des efforts, et créent un monde poignant et si vivant. À lire absolument