L’empire tsariste, puis soviétique, fut remarquable par sa durée, par sa continuité territoriale sur deux continents, l’Europe mais aussi l’Asie, et surtout par sa composition, foisonnante mosaïque de peuples aux cultures et aux religions (christianisme, islam, judaïsme, bouddhisme, animisme) les plus variées, aux organisations sociales diverses (nationales, tribales ou claniques), aux langues innombrables, certaines dépourvues d’écriture. Faute de pouvoir dominer leur empire en profondeur, les tsars en respectèrent généralement la diversité et une relative autonomie. Lénine poursuivit pragmatiquement cette politique, mais Staline procéda à des brassages de populations et, dessaisissant peu à peu les républiques et les territoires de leur pouvoir réel au profit du Parti, instaura un centralisme russifiant qui, sous Gorbatchev, hâta par réaction l’implosion de l’URSS.
La complexité du sujet fait que cette analyse magistralement développée, mais inévitablement détaillée, exige du lecteur une attention soutenue. Elle pose le problème de l’évolution géopolitique future de la Russie qui met actuellement en avant sa composante islamique, malgré son héritage d’un destin européen, pour se glisser dans le groupe des grands États d’Asie.