L’épaisseur des âmes

TÓIBÍN Colm

Épaisses sont les âmes des mères et des fils, construites de strates obscures, depuis le passé utérin jusqu’à l’adolescence et l’âge adulte, ses non-dits, ses ambiguïtés… Ajoutée à cela l’Irlande – sa religion, le poids de ses communautés, sa musique et ses pubs, sa mer et ses landes qui construisent les fortes femmes et les hommes mutiques –, et les relations maternelles s’embrument d’un halo d’exotisme. Un truand découvre qu’il est trahi par sa mère, ou une mère apprend que son fils prêtre est pédophile, ou un jeune homme a une première expérience homosexuelle après l’enterrement de sa mère… Les situations varient, mais chaque récit, soigneusement détaillé, est parcouru d’émotions d’autant plus intenses qu’elles ne sont pas dites. Le dernier, plus long, se passe curieusement en Catalogne, dans un hameau d’où la mère s’est enfuie un soir de neige. Les vautours du printemps signaleront le cadavre… Colm Tóibín avait abordé les relations mère/fille dans Le bateau-phare de Blackwater (NB avril 2001). Sur un thème à nouveau familial, ses nouvelles parviennent souvent à suggérer l’indicible.