Les Bourgeoises

OHAYON Sylvie

Anorexiques, déprimées, perverses, oisives ou carriéristes, souvent riches, toujours intéressées, elles s’appellent Louise, Ombeline, Marie-Adeline, Marie-Lys… Sylvie, la narratrice, les a croisées au bureau, dans la rue, dans la vie. À ses yeux de séfarade tunisienne issue de la banlieue, ainsi sont les bourgeoises dont elle établit au fil des chapitres une typologie sans concession. Si sa propre réussite professionnelle lui a permis de côtoyer ces femmes, jamais elle ne lui permettra d’être adoptée par elles : les bourgeoises pratiquent une distance de bon aloi et tracent une frontière invisible infranchissable qui rend toute mixité sociale impossible. Arc-boutée sur quelques clichés porteurs, la banlieue, la misère, les riches, Sylvie Ohayon brosse à gros traits furieux une galerie de portraits féminins en majorité simplets et manichéens. Un ressentiment incontrôlé domine sa prose rageuse. Les immigrées pauvres y ont l’apanage du coeur et de la générosité, les bourgeoises celui de l’égoïsme froid et de son hypocrite violence : un constat sans appel qui tout d’abord irrite. Viennent cependant en fin de recueil quelques pages d’autocritique qui nuancent le propos. Émouvantes, elles arrivent bien tard pour permettre d’apprécier cette écriture artificiellement durcie, mais non dépourvue de talent.